RCHIVES
Rétablir le caractère maritime du Mont Saint-Michel
par Claude LIBERMANN, Ingénieur Général des Ponts et Chaussées, coordinateur interministériel pour le Mont Saint-Michel
Conférence
prononçée le 25 février 2009
Depuis le démarrage des travaux de rétablissement de son caractère maritime, en 2006, le
Mont-Saint-Michel, un espace mythique où se fondent l’eau, le ciel et la sable,
sous le regard de ce que le travail de l’homme a pu faire de mieux au fil des
siècles, retrouve une nouvelle espérance.
Le rocher et les monuments se trouvent aujourd’hui défigurés par un parking de 15 ha directement sur les grèves, une très haute fréquentation au printemps et en été, avec 86% des visiteurs qui viennent en voiture. De plus, la baie magnifique s’ensable progressivement et disparaît sous les herbus, évolution accentuée par l’utilisation pour l’élevage de terres conquises sur la mer, les polders. L’opération nationale décidée en 1995 et engagée sur le terrain en 2006 a pour objet de remédier à toutes ces dérives. Elle est complexe et progressive, avec un achèvement prévu en 2015.
Elle comprend cinq étapes successives.
Un nouveau barrage sur le Couesnon, à 2 km du Mont, va permettre de nettoyer
la baie en utilisant les marées. Il permet de domestiquer les apports d’eau et
de les utiliser, en phase de marée descendante, pour enlever les sédiments
déposés. Esthétique et efficace, il s’achève et fonctionnera à l’automne 2009.
Un promontoire offre une vue nouvelle imprenable sur le Mont et sa baie.
Pour être pleinement efficace, ce barrage exige des aménagements hydrauliques importants, en amont pour disposer du réservoir nécessaire de 1 100 000 m³, par le curage du Couesnon et le creusement d’un réservoir complémentaire dans l’anse de Moidrey, en aval pour orienter les courants et faciliter leur action, d’abord à l’ouest du Mont, côté Bretagne, et, quand tout sera achevé, à l’est, côté Normandie et Avranches.
Le déplacement du parking à l’intérieur des terres, au sud du hameau de
la Caserne, exige la construction d’un nouveau parking paysagé de 4 000
places, disposant de toutes les facilités modernes. La réalisation de ce
parking sera comprise dans une procédure de délégation de services publics en
cours d’appel d’offres avec des groupements d’entreprises privées.
La construction de ce parking s’accompagnera
de la construction d’une jetée et d’un pont-passerelle permettant la
coupure de la digue route actuelle sur 800 m, élément fondamental du
rétablissement du caractère maritime. Le lauréat du concours est l’architecte
Feichtinger, qui a construit la passerelle Simone de Beauvoir sur la Seine,
entre la grande bibliothèque et Bercy. Le traitement architectural de ce
pont-passerelle invitera le piéton à observer les ambiances maritimes qui se
succèdent autour du Mont. Au pied du Monument, la cale et le gué accueilleront
les visiteurs ; le type de revêtement, qui devra se fondre avec l’eau et
le ciel, est particulièrement important.
Enfin, la future navette entre le parking et le Mont, le « passeur », sera l’élément central du dispositif. Ses caractéristiques sont encore en discussion : comment assurer un tarif d’accès populaire pour le parking et le trajet en navette ? La navette pourra-t-elle être réversible ou devra-t-elle se retourner à l’entrée de la passerelle ? Jusqu’où pourra-t-elle accéder sur la passerelle ? D’où partira-t-elle, du sud ou du nord du hameau de la Caserne ? Peut-on ajouter des formes de navettes plus ludiques, par exemple avec des chevaux ?... Comment, à la gare de Pontorson, assurer une relation rapide, de quai à quai, entre la navette et un réseau ferroviaire plus rapide et plus moderne, grâce à l’accélération du TGV Paris-Rennes, de façon à augmenter fondamentalement le nombre de visiteurs en train ?
L’ensemble
du projet est conduit sous l’œil très attentif de l’opinion, très sensible à
tout ce qui touche le Mont-Saint-Michel, par un syndicat mixte regroupant les
régions de Basse-Normandie et de Bretagne, le département de la Manche et les
communes concernées, en premier celle du Mont-Saint-Michel. L’Etat y joue un
rôle fondamental, au plan du financement, entre 50% et 60% du coût, et du
pilotage régulier.
J’invite
tous les anciens de Blaise Pascal à se rendre compte sur place, en premier du fonctionnement
et de l’apport du nouveau barrage, et à suivre toutes les prochaines étapes, en
premier la conclusion de la délégation de service public, ensuite la
construction du parking et de la passerelle qui vont suivre. En 2015, si le
déroulement des phases successives se passe comme prévu, le Mont-Saint-Michel
aura retrouvé son caractère maritime, pour le bénéfice de l’environnement et la
qualité de la visite.
(
Rédaction : Danielle FOURT)
(On trouvera une foultitude d'informations sur le déroulement du projet sur le site officiel du syndicat mixte pour le rétablisement du Caractêre maritime du Mont