RCHIVES
Noms de
terroirs et noms de rues à Clermont
15 mai 2009
Jean
Pierre CHAMBON est professeur de linguistique romane et langue et littérature
d’oc à l’Université de Paris-4 - Sorbonne, et Ancien Elève du Lycée
Blaise Pascal
L’étude des noms de lieux (ou toponymie) est une branche mineure de la science des langues et du langage, la linguistique. Dans notre pays, cette branche est généralement retardataire, notamment dans les secteurs qui nous retiendront aujourd’hui, la microtoponymie (étude des noms de terroirs) et l’odonymie (étude des noms de rues). Dans notre pays, la toponymie a en effet été trop souvent laissée, depuis longtemps, à des amateurs ou semi-professionnels sans formation ni méthode et coupés du mouvement de la science.
1.
Bref état des
lieux des études de microtoponymie clermontoise En ce qui concerne la microtoponymie clermontoise, la situation n’est pourtant pas si mauvaise. L’archiviste, historien et archéologue Pierre-François Fournier — qui travailla tout au long de sa carrière à implanter les bonnes méthodes des sciences historiques dans notre région — nous a en effet légué une base de départ de valeur dans les Nouvelles Recherches sur les origines de Clermont-Ferrand (Desforges et. al. 1970). Dans cet ouvrage, il a non seulement étudié avec soin les dénominations successives de notre ville (p. 548-571), mais encore une vingtaine de noms de terroirs de Clermont et de sa banlieue (p. 472-483). P.-F. Fournier a ainsi indiqué le chemin à suivre, et il convient de rendre hommage à sa mémoire. Plus récemment, un historien médiéviste (Emmanuel GrÉlois) et un linguiste romaniste (moi-même) avons publié régulièrement, le plus souvent en collaboration, sur la (micro)toponymie de Clermont-Ferrand et de ses environs (voir à la bibliographie, ci-dessous). Nos travaux reposent sur une documentation historique aussi étendue que possible, le plus souvent tirée de documents médiévaux inédits. |
En exploitant cette documentation, il ne s’agit plus pour nous de spéculer en quelques lignes sur la seule origine des noms de lieux, comme c’est le cas dans la plupart des ouvrages, mais au contraire, après avoir exposé de manière organisée l’ensemble des témoignages, de retracer, autant que possible, tout le développement des toponymes. Nous nous efforçons donc de passer de l’étymologie-origine à l’étymologie-histoire des mots, c’est-à-dire de faire subir à la toponymie la mutation que l’étymologie lexicale a connu il y a longtemps. Nous tenons compte, en outre, du contexte sociolinguistique, en particulier de la situation séculaire de contact puis de substitution de langues entre l’occitan auvergnat et le français (un long processus qui s’étend du XIVe au XXe siècle). Bien qu’ils s’attachent à une analyse microscopique des noms, nos travaux comportent donc un volet méthodologique ambitieux : ils s’efforcent, à l’instar de ceux de Marie-Guy Boutier, Martina Pitz, Andres Kristol ou Wulf MÜller, de donner une idée de ce que serait une toponymie tenant compte des exigences de la linguistique, de la philologie et de la lexicographie.
Une première synthèse de ces recherches nous a conduit à dégager et à étudier de manière approfondie, dans un petit livre récemment paru, une quarantaine de noms de terroirs clermontois formés à l’époque latine, depuis la conquête romaine jusqu’à 700 environ (GrÉlois/Chambon 2008, ouvrage préfacé par Max Pfister et par Gabriel Fournier). Nous espérons que, dans le cadre de l’Atlas topographique d’Augustonemetum qui se prépare, sous la direction d’Hélène Dartevelle, au service de l’archéologie de la DRAC, nos résultats pourront bientôt être confrontés de plus près à ceux obtenus par l’archéologie.
2. La toponymie urbaine et les noms de rues
dans le Clermont d’aujourd’hui
Les progrès ayant porté surtout sur les noms de terroirs, ce sont les noms de rues clermontois qui demeurent la grande inconnue. Au plan de la recherche scientifique, le terrain est ici pratiquement vierge[1].
2.1. La microtoponymie urbaine
Aujourd’hui, la toponymie urbaine de Clermont consiste essentiellement, comme toute toponymie urbaine, en des noms de voies (rue Pascal), de places (place Gaillard) et de quartiers (Saint-Jacques) ; à ce stock fondamental, on doit joindre les noms des espaces verts (le Roi des Eaux) et ceux de certains monuments (la Pyramide) ou bâtiments (le lycée Blaise-Pascal). Les noms des rues et des places présentent en grande partie un caractère officiel et largement figé. Juridiquement propriété de la commune, l’odonymie se transforme par décision municipale : il n’a fallu qu’un trait de plume pour remplacer boulevard de la Pyramide par boulevard Léon-Malfreyt, pour faire sortir du boulevard Gergovia un boulevard Charles-de-Gaulle, puis un boulevard François-Mitterrand, ou encore pour changer le référent de la rue Domat (transférée du centre ville à une impasse de Saint-Jacques). L’odonymie apparaît ainsi, en synchronie, comme un stock normé et codifié (une terminologie) et elle semble relever typiquement, en diachronie, du changement par le haut.
2.2. Usage officiel et usage réel
L’usage des noms de quartiers est, au contraire, plus lâche et moins codifié. D’autre part, l’usage réel n’est pas en tous points conforme à l’usage officiel (cf. Bouvier 2007, p. 206-210).
1/ Il existe des réalités urbaines qui ne possèdent que des dénominations officieuses : — noms de voies, comme le Grand Passage ou les Grands Escaliers (avec un pluriel du français dit populaire) ; — noms de bâtiments ou de monuments : la Muraille de Chine, les Pistes, la Poste Saint-Éloi, la Goutte de lait, la Halle au Blé, le Pont des Trois Coquins, la Pyramide ; — noms de quartiers : la Barrière d’Issoire (repris dans le nom d’un arrêt de bus : Barrière d’Issoire), le Fond de Jaude (la réalité désignée a disparu, mais on l’évoque encore), le Plateau Central (nom dont l’usage est revenu en force assez récemment).
2/ Il existe également des usages spécifiques du code oral ou d’un style de langue familier : on dit, par exemple, la place des Carmes ou les Carmes (et non place des Carmes-Déchaux), Delille, Gaillard, Jaude. Tels des surnoms, certaines dénominations se superposent aux dénominations officielles et solennelles : Blaise, Jeanne, Sidoine. Il s’agit souvent, comme on le voit, d’ellipses. Certaines dénominations familières d’autrefois n’ont pas survécu : selon le témoignage de Pierre Hospital (1906) — auteur né en 1836 —, l’avenue de Royat porta le surnom d’avenue magistrale et le quartier des Salins, celui de petite Provence. Il peut arriver aussi qu’une dénomination familière soit venu doubler une dénomination non officielle : ainsi disait-on, dans les années 1950, le Roidé pour le Roi des Eaux (officiellement dit square d’Assas). Il s’agit ici d’une troncation (apocope) dont la saveur populaire et plaisante, voire argotique, est évidente.
«On allait
aussi au “Roidé”. Le “Roidé” c’est bien sûr le square du Roi
des Eaux, derrière les Galeries de Jaude, que l’on appelait pas encore les
Nouvelles Galeries. / Ah! le Roidé !
il en a vu des bagarres, il en a entendu des conciliabules.» (André Peyrin,
«Les caramels mous», article de la
Montagne, s. d., écrit au moment de la démolition du Fond de Jaude;
souvenirs d’enfance des années 1950.)
3/ Certains noms officieux sont des archaïsmes qui résistent depuis longtemps à des changements impulsés d’en haut. La plupart des Clermontois parlent encore de la place des Salins (officiellement dite place Gambetta depuis 1900 !). Bon nombre d’entre eux sont fidèles à place Chapelle de Jaude (officiellement place de la Résistance depuis 1954). Dans les années 1960, on disait couramment la rue Neuve (rue du Onze-Novembre depuis 1918). On peut encore signaler le cas d’un nom de bâtiment (l’hôpital psychiatrique) qui ne survit plus que dans une locution verbale familière : être bon/mûr pour le Bois de Cros “être fou”.
4/ Enfin, certains noms possèdent, à côté d’une forme orale officielle conforme aux règles de lecture du français normatif, par exemple place de [jód] (qu’on entend dans les annonces du tram), une forme orale conforme aux règles phonologiques propres à la variété clermontoise et auvergnate du français : place de [jòd]. Ce cas est bien connu ; il fait assez largement partie de la conscience collective et sert même de marqueur identitaire.
«Il nous reste la place de Jaude. Que les naturels
prononcent Jode, de même qu’ils disent puy de Dome, parce qu’ils ignorent
l’o fermé suivi d’un e muet» (Jean Anglade, Le
Pays oublié, Romagnat, 20072 [1982], p. 47).
«La place de Jaude / Les Clermontois disent simplement
Jaude (prononcer Jode)» (Pierre
Mazataud [coord.], Auvergne. Bourbonnais.
Velay, Paris, Guides Bleus, 1992, p. 233).
«Prononciation
locale : Jode» (Jean Anglade, Le Grillon vert, Paris, 1998, p. 189).
Je n’ai jamais entendu dire, en revanche, rue Prév[o]te, mais toujours rue Prév[ò]te, bien que la forme écrite s’adorne d’un accent circonflexe. Citons aussi l’avenue Albert et Élisabeth des plans et des plaques, qui est dans l’usage oral avenue [albèrelizabèt][2].
2.3. D’abord observer
Aussi n’est-il n’est pas possible, même en matière d’odonymie, de se contenter des nomenclatures officielles. L’usage réel et ses particularités méritent d’être observés et décrits. De la même façon, le linguiste ne saurait se satisfaire, pour appréhender la réalité du français d’aujourd’hui, d’une grammaire scolaire de la langue écrite normée. Il faut donc commencer par recueillir les usages auprès des locuteurs, et ce dans la réalité première de la langue, l’oralité. Le point de vue du linguiste sur la toponymie urbaine se distingue sur ce point de celui de l’historien et de l’érudit local.
Cette tâche descriptive, dont personne ne se soucie, n’est d’ailleurs pas si facile à accomplir : on ne dispose d’aucun modèle en la matière et chacun d’entre nous ne connaît qu’une partie de la ville et des usages. Jusqu’en avril dernier, j’ai ignoré que tel bâtiment de la manufacture Michelin était familièrement et plaisamment appelé le Hilton et je n’ai appris que plus récemment encore que le siège de l’administration de l’agglomération clermontoise, avenue de l’Union Soviétique, étaient surnommé le crayon. Toutes les bonnes volontés sont évidemment les bienvenues dans la collecte des usages réels.
«Clermont-Ferrand : / Le
«Hilton» promis à la démolition
/ perspectives. Michel Rollier, le
patron de Michelin insiste. En dépit d’une baisse de ses effectifs, la
manufacture va assurer son ancrage à Clermont-Ferrand : le siège social est
conforté, la rénovation des Carmes confirmée avec, notamment, la démolition
programmée du «Hilton», le bâtiment qui longe l’avenue Jean-Baptiste-Dumas, à
droite sur notre photo.» (La Montagne,
jeudi 2 avril 2009, p. 1.)
«HILTON» / Ironiquement baptisé le «Hilton» par les
Bibs, ce bâtiment du site des Carmes, situé le long de l’avenue
Jean-Baptiste-Dumas, va être démoli, “dès que la crise sera derrière nous”. Qui
dit qu’on ne regrettera pas ce «monument» du paysage clermontois ?» (La Montagne, jeudi 2 avril 2009, p. 5.)
«CLERMONT CO / Une vue aérienne de ce que tout le monde appelle désormais «le crayon», du siège de Clermont Communauté ainsi que d’une partie du 92e RI, tout en bas de l’avenue de l’Union-Soviétique.» (La Montagne, jeudi 29 ami 2009, p. 23 [légende d’une photographie].)
3. Les noms de rue à Clermont : une
invention (de la fin) du XIIIe siècle
Abandonnons à présent l’observation de la synchronie actuelle pour adopter le point de vue diachronique ou historique. En effet, les noms de rue n’ont pas toujours existé, et, en perspective diachronique, la première question à se poser est celle de savoir quand ce type de noms propres a fait son apparition. Pour esquisser une réponse, je m’appuierai sur la documentation qu’E. GrÉlois a eu l’obligeance de mettre à ma disposition (voir aussi GrÉlois 2004).
3.1. Le stade prétoponymique : d’abord des descriptions définies
Dans la plus ancienne documentation médiévale clermontoise, certains lieux-dits urbains, certains quartiers, des portes et des tours, voire des maisons, sans parler, bien entendu, des terroirs agricoles péri-urbains, sont désignés par des noms propres. Mais ce n’est pas le cas des rues. Au XIIIe siècle, jusqu’aux années 1280, les voies urbaines sont néanmoins désignées, en latin ou en ancien occitan ; mais elles le sont par ce qu’on appelle des descriptions définies signifiant “la voie qui conduit à X” ou “la voie qui vient de X et conduit à Y” (cf. GrÉlois 2004, p. 336-337). C’est cet usage qu’on observe dans des documents datant de 1231-1234, 1240, 1242, 1248, 1251, 1265 environ, et 1276. Ainsi, au début du terrier rédigé en 1242 (en ancien occitan régional) pour Notre-Dame du Port (Terrier Dogue), le rédacteur décrit avec précision la situation de nombreux biens urbains. Pour désigner les voies, il a presque toujours recours à des descriptions définies, parfois complexes.
Exemples de
descriptions définies : la charreirha
cuminal per ont hom vai de Clarmont, per la porta del Champ Herm, a Montferrant
[“la voie commune par laquelle on va de Clermont, par la porte du Champet
(place Delille), à Montferrand” = l’actuelle rue du Port)], la via cuminal que meu dal forn e vai a la
maizo Ro. de Saint Dezieri [“la voie commune qui part du four et conduit à
la maison de Ro(bert) de Saint-Didier”] (1242, Terrier Dogue, Archives Départementales
du Puy-de-Dôme, 4 G 55, folios 1 et 7).
3.2. En 1242 : un premier nom propre de rue
À côté de ces désignations lourdes qui nous donnent l’impression de périphrases embarrassées, on ne peut relever qu’une seule exception. Elle se trouve, en 1242, dans un passage du Terrier Dogue, dans lequel la Grant Charreirha cuminal (folio 3) ou simplement la Grant Charreirha (folio 3, verso) est un nom propre (non complètement fixé) servant à désigner l’actuelle rue Blaise-Pascal. Il s’agit là du premier odonyme clermontois. Le fait que la Grant Charreirha (cuminal), s’applique à une rue envisagée comme la rue principale n’est certainement pas dû au hasard. Il est naturel que le procès d’odonymisation ait commencé par la rue, puis les rues les plus importantes, celles dont les noms étaient le plus largement socialisés et appelés à être le plus fréquemment usités dans le discours. On retire donc l’impression que jusque dans les années 1270 la grande majorité des voies urbaines clermontoises ne portaient pas encore de noms propres, et que l’on appréhende en 1242 le phénomène d’odonymisation in statu nascendi.
3.3. Multiplication des odonymes à partir
des années 1280
Au cours des années 1280, les mentions de noms propres de rues commencent à se multiplier : en 1282, carriera [...] de Furno Rauzent ; en 1283, viam Prepositalem ; en 1285, la charreyra deu Gratz de Clarmont, la charreyra de Lanta (ou de l’Anta), la charreyra als Manhas, la charreyra de Saynt Peyre et la volta als Folcheyrs; en 1287, rue Ferrayró. Leur nombre s’accroît au cours du XIVe siècle (documents de 1312, 1314, 1310-1315, 1317, 1318, 1329, 1331, 1332, 1334, 1351, 1352, 1353, 1365, 1368, 1371, 1372, 1375, 1376, 1377, 1379, 1380, 1382, 1383, 1384, 1386, 1390, 1392, 1399, 1400 etc.), période durant laquelle le système de repérage odonymique se met définitivement en place.
Le procès d’odonymisation a cependant été graduel : les désignations prétoponymiques (au moyen de descriptions définies) n’ont pas immédiatement disparu ; elles se sont maintenues, au contraire, longtemps après la création des premiers noms propres de rues : c’est encore le cas, par exemple, en 1398 (GrÉlois 2004, p. 335-336). On remarque en outre que, malgré ce qui a pu être suggéré (Bouvier 2007, p. 23; cf. aussi GrÉlois 2004, p. 336), les descriptions définies prétoponymiques ne constituent pas, à Clermont, la source concrète des noms propres de rues. Ces derniers ont repris de préférence des noms urbains préexistants (rue Forosan, rue des Gras, rue Prévôte, rue du Terrail) ou constituent des créations originales. Elles ont certes précédé les noms propres de rues, mais elles ne les ont pas engendrés, du moins dans notre ville.
Tout incite à
croire, au total, que les noms de rues sont, à Clermont, une invention du XIIIe siècle et, plus
précisément, de la fin du siècle. L’apparition de cette nouvelle sous-classe de
noms propres est à mettre en relation, d’une part, avec l’extension de la ville
qui se produisit «entre la fin du XIIe
siècle et les années 1230», et, d’autre part, avec l’«essor de l’acte écrit et
des formules notariées» (GrÉlois 2004, p. 339, 332). Cette
conclusion s’accorde avec la chronologie française : «d’une façon générale il
semble bien que ce ne soit pas avant le xiiie siècle, et même plutôt la
fin de ce siècle, que l’usage se soit peu à peu répandu de donner un nom aux
rues des villes médiévales» (Bouvier 2007,
p. 18)[3].
3.4. Ce qui subsiste du plus ancien stock
odonymique clermontois
Créés à partir du milieu et surtout de la fin du XIIIe siècle, les plus anciens noms de rue clermontois ont par conséquent été formés dans la variété régionale (auvergnate) de l’ancien occitan. Certains des odonymes le plus anciennement attestés ont été empruntés ensuite par le français quand l’usage de cette langue s’est répandu dans notre ville, puis sont parvenus à se maintenir jusqu’à nos jours. La strate la plus ancienne de notre patrimoine odonymique comprend les noms suivants : rue Forosan, nom attesté depuis 1282, qui s’appliquait, au Moyen Âge, à l’actuelle rue de la Treille (GrÉlois 2004, p. 342) ; rue Prévôte, nom attesté depuis 1283 (GrÉlois 2004, p. 339-341; Chambon 2006) ; rue de l’Ente (depuis 1285) ; rue des Gras (depuis 1285) ; rue du Terrail (depuis 1329 ; GrÉlois 2004, p. 342-243) ; rue de Beauregard (depuis 1332). On peut y joindre rue des Petits-Fauchers (cf. la volta als Folcheyrs en 1285)
4. Les noms de terroirs clermontois Passons maintenant aux noms de terroirs (lieux-dits). Ceux-ci désignaient encore au XIXe siècle, voire dans le courant du XXe siècle, les masses parcellaires d’une périphérie clermontoise demeurée surtout rurale. Du fait de l’urbanisation, ces noms ont, en tant que tels, pratiquement disparu de l’usage actuel, bien qu’ils soient encore consignés au cadastre. Quel Clermontois d’aujourd’hui saurait dire où se trouvent Croix Pailloux, Lize Faite, les Pavages, le Piège, les Sandots ou la Baraque de Durtol ? De manière générale, les noms de terroirs n’ont survécu à l’urbanisation que dans la mesure où ils ont pu se transformer en noms de quartiers urbains ou entrer dans des noms de rues ou de places. Si nous ne connaissons plus aujourd’hui Bouys ou Rochefeuille comme noms de terroirs, nous pouvons connaître la rue et l’impasse de Bouys ainsi que la rue et l’allée de Rochefeuille. Les noms de rue de l’époque contemporaine n’ont donc pas seulement servi à afficher le culte républicain des grands hommes ou, dans le cas bien connu des rues des cités Michelin, à l’éducation morale paternaliste de la classe ouvrière (rue du Devoir, rue de la Foi, rue du Courage etc.). Ils ont également joué le rôle de transmetteurs de la microtoponymie rurale traditionnelle dans la nouvelle ville en expansion à partir du début du XXe siècle. |
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L’odonymie a
même parfois servi de conservatoire en retenant des noms de terroirs qui
n’avaient pas été officialisés au cadastre de 1831. C’est le cas de la Crouzille dans rue de la Crouzille; de Neyrat
dans rue de Neyrat; de le Puy
Monteix dans boulevard/rue du Puy Monteix; de le Puyou dans rue du Puyou ou encore le
Rassat dans rue du Rassat. 5. Noms de terroirs d’origine antique Parmi les noms de terroirs clermontois documentés à l’époque contemporaine ou dans la documentation médiévale, une quarantaine remonte à l’Antiquité ou à l’Antiquité tardive (GrÉlois/Chambon 2008). 5.1. Les microtoponymes d’origine antique : anciens noms de villae 1/ Prenons le cas du microtoponyme Rassat, qui n’a survécu que dans rue du Rassat (cette voie joint la rue de l’Oradou au boulevard Gustave-Flaubert) et qui nous permettra d’aborder la strate toponymique antique ou latine. Il est documenté dès 895 environ, comme nom d’une villa. Après le xie siècle, il subsiste pour désigner un terroir rural que l’on peut attester jusqu’en 1773. Ce changement de référent (d’un nom de villa à un nom de terroir) traduit la concentration qui, autour de l’an Mil, a affecté l’habitat dispersé hérité de l’Antiquité, un phénomène mis en relief en Auvergne par Gabriel Fournier (1962). Rassat continue un dérivé *Raciacus formé à l’aide du suffixe de latin régional -acus sur un nom de personne latin (Racius ou Rattius). Ce toponyme servit à désigner l’une des villae romaines édifiées dans la région clermontoise, généralement au Ier siècle, comme l’ont montré, notamment, les recherches de Frédéric TrÉment et de son équipe (TrÉment 2000, 2002, 2004; Dousteysier et al. 2004). |
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2/ Ces villae — dont, à Clermont-Ferrand même, en l’absence de vestiges archéologiques, nous ne connaissons le plus souvent que le nom — témoignent de la romanisation de l’économie et de l’adoption par les couches dominantes arvernes du mode de vie romain. Les noms de ces exploitations agricoles appropriées sur une base familiale sont formés en latin sur le nom du propriétaire, généralement son gentilice (nom de gens) en ‑ius (Marcus Tullius Cicero), le plus souvent à l’aide d’un suffixe (‑acus, ‑anus, ‑anicus). Une fois enregistré au cadastre, le nom de la villa était fixé, même si le propriétaire changeait. Sur le territoire de la commune de Clermont-Ferrand (4000 ha), E. GrÉlois et moi-même avons pu relever une vingtaine de ces toponymes latins dénotant des villae romaines. La plupart sont, comme Rassat, des dérivés en ‑acus (un suffixe de latin régional, d’origine gauloise), mais trois d’entre eux remontent à des gentilices employés adjectivement (comme dans via Domitia ou lex Claudia), au masculin : Bouys, Chatuts (nom disparu), Herbet. Tous ces noms prédiaux clermontois reposent en outre sur des anthroponymes appartenant au stock proprement latin, ce qui dénote un vif désir d’intégration à la romanité de la part de l’élite foncière de la capitale (abandon des noms gaulois) et livre un indice supplémentaire permettant de penser que la romanisation de ces couches fut rapide et profonde. Autour d’Augustonemetum/Clermont, on trouve des villae «toponymiques» à l’emplacement de l’usine Michelin des Carmes (Chatuts†)[4], vers Trémonteix (Bouys) et Montjuzet (Chauriat† ; Miserac†), vers la Banque de France (Clorat†), aux Salins (Flaminat†), à Vallières (Cussat), vers la Sarre (Rassat) et les Landais (Sensat†). À l’est de la ville romaine, dans la zone montferrandaise de la commune, onze autres villae se raccordent au réseau serré de la Grande Limagne (moins d’un kilomètre de distance entre les villae) décrit par Frédéric Trément : Albeyrat†, Chiniac†, Flamina, Flavinhac†, Gandaillat, Herbet, Marsat, Neyrat, Pradalhac†, Pressat†, Signac†. L’analyse des toponymes conduit donc à se représenter Augustonemetum comme une ville ouverte ceinturée de domaines agricoles, et permet de concrétiser les vers de Sidoine Apollinaire célébrant la capitale arverne dans le Panégyrique de l’empereur Avitus : «[...] fecundus ab urbe / pollet ager». |
«Est mihi, quae
Latio se sanguine tollit alumnam,
tellus clara uiris,
sui non dedit optima quondam
rerum opifex
natura parem ; fecundus ab urbe
pollet ager,
primo qui uix proscissus aratro
semina tarda
sitit uel luxuriante iuuenco
arcana exponit
piceam pinguedine glaebam.»
(Sidoine Apollinaire, Carmina,
VII, v. 139-144.)
[Trad. Loyen : «Il est dans mes domaines une terre qui s’enorgueillit d’être de même sang que les Latins, une terre illustrée par des héros, à laquelle la Nature, la bienfaisante créatrice de toutes choses, n’a pas donnée d’égale. Dès les portes de la ville, s’étendent des champs fertiles, qui à peine ouverts par le premier labour ont soif des semences trop lentes à leur gré et découvrent à la vue une glèbe noire d’une fécondité mystérieuse, même si les bœufs s’abandonnent à la paresse».]
3/ C’est aussi Sidoine Apollinaire qui nous renseigne sur la seule villa de Clermont documentée par un texte antique : Cuticiacus, devenu Cussat. On sait grâce à lui qu’en 471 cette villa appartenait au patrimoine d’une famille de la haute aristocratie arverne, celle de l’empereur Avitus. L’examen des mentions toponymiques permet de localiser Cuticiacus dans la zone où convergent les communes de Clermont-Ferrand, de Beaumont et de Ceyrat. C’est presque exactement à la limite de ces trois communes, 62 rue du Docteur-Lepetit, que l’archéologie a retrouvé (sans le savoir) ce qui nous paraît avoir été la résidence du propriétaire (CAG 63/2, p. 54). Il s’agit d’un cas d’école extrêmement rare où les résultats de l’histoire, de l’archéologie et de la toponymie se recoupent. On pourrait penser — mais ce n’est là qu’une hypothèse non vérifiable — que le théâtre de Montaudou (en cours d’étude) a pu être érigé sur le domaine de Cuticiacus par un acte d’évergétisme dû à un Arverne de premier plan.
5.2. Les microtoponymes d’origine antique : anciens noms de terroirs
À côté des noms de villae suburbaines, il existait bien entendu, durant l’Antiquité, des noms de terroirs, formés non sur des noms de personne, mais sur des noms communs. L’érosion toponymique s’est certainement exercée de manière beaucoup plus vive sur ces noms non officiels que sur les noms de villae. Une vingtaine de ces noms de terroirs antiques ou tardo-antiques sont toutefoiss parvenus au moins jusqu’au Moyen-Âge et parfois jusqu’à nous (GrÉlois/Chambon 2008). Je n’en évoquerai que quatre.
1/ Columbarius† est le nom de terroir clermontois le plus anciennement attesté en tant que tel, puisqu’on le lit peu après 676 dans la Passio de saint Priest. Le saint évêque de Clermont fit édifier un hospice-hôpital (xenodochium) «dans le lieu appelé Columbarius». Ce terroir se laisse localiser à proximité des rues Sainte-Madeleine, Gabriel-Péri et Saint-Dominique. Le nom, qui n’est plus attesté après le XIVe siècle, témoigne de la pénétration des activités rurales — en l’occurrence, l’élevage des pigeons dont l’engrais était apprécié — à toute proximité de la ville. On peut donc penser qu’il renvoie à une période postérieure à la rétraction de celle-ci, c’est-à-dire au Bas Empire ou à une date plus tardive encore.
2/ À la limite des communes de Beaumont, de Clermont-Ferrand et d’Aubière, le microtoponyme les Rivaux est un avatar du latin *Aurea Vallis “la vallée d’or”. Il s’agit de la désignation imagée d’un vignoble, d’après la couleur des vignes au moment des vendanges. Le val ayant motivé objectivement le toponyme est facile à repérer entre le cimetière de Saint-Jacques, le parc du Masage et l’avenue Léon-Blum.
3/ La viticulture est également représentée par Vinzel, nom d’un terroir qui s’étendait au Moyen Âge sur le territoire des communes actuelles de Gerzat, Cébazat et Clermont-Ferrand. Ce nom appartient à une série étudiée par Albert Dauzat (1939, p. 157-164) et particulièrement bien représentée en Auvergne, et remonte au latin *vinyicellla “petite vigne”.
4/ Croix Pailloux†, encore mentionné au cadastre de 1831, désignait un terroir situé à la limite de Clermont-Ferrand, Chamalières et Durtol, sous la Montagne Percée. Le second terme de ce composé (Pailloux) continue, à la suite d’une histoire fort complexe, le latin spelaeum “caverne”, un mot relevant d’un style de langue élevé (Cicéron, Virgile) et qui n’a pas vécu dans les langues romanes, ce qui peut donner à méditer sur la qualité du latin d’Augustonemetum, où la nouvelle langue fut introduite tout d’abord par l’école.
5.3. Les microtoponymes d’origine antique :
bilan
Au total, noms de villae et noms de terroirs, c’est une quarantaine de microtoponymes remontant à l’Antiquité ou à l’Antiquité tardive que l’on peut relever sur le territoire communal de Clermont-Ferrand. La densité de ces survivances est remarquable : un nom antique pour environ 100 hectares, en moyenne. On est frappé a contrario par le très faible nombre des toponymes plus anciens, d’origine gauloise (les seuls qui paraissent assurés sont Jaude et Chantoin)[5], sans doute antérieurs à la création de la ville romaine. On peut supposer que la romanisation s’est accompagnée d’une profonde déceltisation toponymique. Il semble probable, en outre, que les rares noms gaulois qui ont été conservés ne s’appliquaient ni à des villae, ni à des terroirs ruraux. Le fait est assuré pour Jaude qui continue le nom du temple Vasso Galate mentionné par Grégoire de Tours.
6. Noms de terroirs d’origine médiévale
Évoquons à présent quelques noms de terroirs formés à l’époque médiévale.
6.1. Quelques noms remontant au haut Moyen
Âge
Quelques microtoponymes clermontois qui présentent un article (et ont donc été formés postérieurement aux noms de la strate latine, soit après 700 environ), mais pour lesquels on a des raisons de supposer une formation antérieure à l’an Mil, peuvent être assignés à une strate qu’on dira haut-médiévale et, linguistiquement parlant, à l’ancien occitan archaïque.
1/ Les Sandots† était le nom du secteur délimité de nos jours par la rue des Chanelles, la rue Chateaubriand, le boulevard Lavoisier et la rue de Montjuzet. Attesté au singulier (le pluriel est récent) et muni de l’article dès 959 (illo Sindocio), ce microtoponyme est issu du latin xenodochium s. n. “hôpital, hospice et maison d’accueil pour les étrangers” (GrÉlois/Chambon 2008, p. 204-205; v. aussi Chambon 2001 et Chambon/GrÉlois 2007, p. 150-152). Ce lexème, qui est lui-même un emprunt au grec d’introduction tardive, est bien attesté dans les sources écrites de Gaule aux VIe et VIIe siècle, où il désigne alors une institution vivante (xenodochia fondés par les souverains ou les évêques) ; son usage se raréfie après la première moitié du IXe siècle. On doit donc supposer qu’il a existé dans le haut Moyen Âge clermontois un autre xenodochium que celui fondé par saint Priest (ci-dessus § 5.2.). La localisation de ce second édifice aux Sandots est sans doute à mettre en relation avec le quartier des premières églises chrétiennes qui s’étendait plus au sud (vers Saint-Alyre).
2/ Cette zone est désignée comme le vicus Christianorum par Grégoire de Tours et comme le vicus urbis dans la Passio de saint Priest (peu après 676). C’est peut-être ce vicus qui explique le microtoponyme lo Vic†, qui désignait au Moyen Âge un terroir septentrional hélas difficile à localiser avec précision, et entrait dans le nom médiéval des Côtes de Clermont : lo Poi del Vic (GrÉlois/Chambon 2007, a ; GrÉlois/Chambon 2008, p. 208-210). Or, les issues de vicus (dans le sens de quartier comme dans celui de “bourgade”) ont disparu du lexique galloroman, sauf en domaine gascon, avant le début du second millénaire.
3/ Les noms la Pradelle et la Parlette (conservés dans les noms de deux rues convergentes) désignaient des terroirs voisins l’un de l’autre. Comme le montrent les formes d’ancien occitan (la Pradela en 1200 environ ; la Pratleta en 1195), le second nom est un dérivé diminutif du premier, lui-même formé sur l’ancien occitan pradela s. f. “pré, prairie” (Chambon/GrÉlois 2008, a, p. 118-20). Les membres de ce couple sont à la fois suffisamment récents pour présenter tous les deux un article défini depuis les premières attestations et suffisamment anciens pour que le diminutif ait subi la syncope de la voyelle intertonique (d’où la Pratleta, et non *la Pradeleta). Or, les dernières syncopes se sont produites à l’époque carolingienne. On peut donc placer la formation successive du simple et du diminutif entre ca 700 et le courant du ixe siècle.
4/ C’est à la même couche qu’appartient le nom ad illos Arcos† qui s’appliquait à un terroir jouxtant Jaude et n’est documenté qu’une seul fois, vers 950-960. L’interprétation de P.-F. Fournier (in : Desforges et al. 1970, p. 129-130 n. 2, 193 n. 29, 500-501), selon laquelle ce nom faisait référence aux arches d’un pont-aqueduc amenant l’eau du Colombier à Augustonemetum, vient de trouver un appui archéologique avec la découverte, 15 rue Gabriel-Péri, des piles d’un aqueduc aérien, d’orientation parallèle à la voie d’Agrippa (La Montagne, 15 juin 2009, p. 7). Il est probable qu’à la date qu’on lui assigne, le microtoponyme a été motivé par des ruines marquant le paysage, et non pas par l’aqueduc en fonctionnement.
6.2. Quelques noms remontant au Moyen Âge central ou au bas Moyen Âge
Les noms de terroirs clermontois formés en ancien occitan au Moyen Âge central ou au bas Moyen Âge sont nombreux, mais encore insuffisamment étudiés. Quelques exemples montreront l’intérêt que cette étude présente, non seulement pour le linguiste, mais aussi pour l’historien.
Voici d’abord un cas où un toponyme nous renseigne sur l’existence d’une église médiévale que ni les textes ni l’archéologie ne font connaître. À la limite de Clermont-Ferrand, Lempdes et Aulnat, sur le territoire de Clermont, en face de l’entrée de l’AIA, se trouve une petite parcelle qui porte un nom pour elle toute seule au cadastre de 1831 : Lize Faite†. Ce nom, aujourd’hui ignoré des personnes possédant des jardins dans ce secteur, est attesté en 1376 sous la forme Gleysa Fraita, composé de l’ancien occitan gleiza s. f. “église” avec l’adjectif fraita “détruite” (Chambon 2003). Détruite dès le XIVe siècle, l’église ayant motivé le toponyme était celle de la petite localité, elle-même détruite, de Pressat. Son ressort a dû être divisé radialement entre la paroisse d’Aulnat, celle de Lempdes et une paroisse clermontoise (peut-être Saint-Julien de Gandaillat). La parcelle doit avoir fossilisé l’emprise de l’édifice et de ses abords immédiats. En 1983, les archéologues ont découvert à proximité une zone funéraire.
Les postes de péage installés aux sorties de la ville ont motivé près d’une dizaine de microtoponymes clermontois (GrÉlois/Chambon 2007, b). Je n’en citerai que quatre. (1) À la sortie nord-est de Clermont, la Barre est un nom de terroir attesté depuis 1494 et dont le souvenir se perpétue dans les odonymes rue de la Barre et allée de la Barre, au pied de Chanturgue. On a affaire à l’ancien occitan barra s. f. “droit de circulation dont le produit était affecté à l’entretien des routes”. (2) Un autre lieu-dit la Barre† se trouvait sur la route de Beaumont, dans le secteur des Salins. (3) À la sortie nord-ouest, sur la route de Limoges, les Pavages† (attesté depuis 1401, au singulier) était le nom d’un terroir proche de Fontgiève (au nord). Ce microtoponyme remonte à l’ancien occitan pavatge s. m. “péage pour l’entretien du pavé et de la chaussée” ou au moyen français pavage, de même sens. On remarque qu’au cadastre de 1831, les Pavages ne s’appliquait qu’à une seule parcelle, de très faible étendue ; celle-ci a probablement fossilisé l’emprise de la construction où se tenaient les percepteurs. (4) À la sortie nord-est, le Piège† désignait un terroir situé dans le triangle actuellement délimité par le boulevard Étienne-Clémentel, la rue Sous-les-Vignes et la rue du Docteur-Bousquet. Il s’agit, avec l’attraction graphique de piège, d’une formation, sans doute plus récente que les précédentes, sur une variante régionale piaige (attestée en Auvergne en 1564) du français péage s. m. “droit sur les personnes, les animaux, les marchandises, pour le passage sur un chemin”.
7. Conclusion
Beaucoup de travail reste à accomplir afin de décrire les noms de terroirs et les noms de rues clermontois, et de retracer leur histoire. J’espère avoir montré que ces noms peuvent être riches d’enseignements historiques et linguistiques, et qu’ils méritent de faire l’objet d’une recherche scientifique sérieuse.
Jean-Pierre Chambon
Professeur de linguistique romaneet langue et littérature d’oc à la Sorbonne (Paris IV)
[1] Pour l’essentiel, on ne dispose en effet que de publications partielles, anciennes ou peu satisfaisantes (MÈge 1865; Tardieu 1870-1872, en particulier 1, p. 677-695 ; Balme 1945 ; Anonyme 1996 ; Passelaigue 2007). Pour le Moyen Âge, on trouvera néanmoins une première approche globale dans GrÉlois 2004. — Sur la toponymie urbaine de la France, on peut signaler plusieurs publications récentes (Billy 1999 ; Bouvier/Guillon 2001 ; Bouvier 2007 ; Collectif 1999 ; Teyssot 2004); en première approche, on peut lire le petit livre de Jean-Claude Bouvier, orienté vers le grand public.
[2] L’index du Plan guide Bleu & Or écrit
«Élisabeth (av. Albert)» !
[3] Qui ajoute : «Cela est évidemment en relation avec l’explosion urbaine qui caractérise cette période de l’histoire». Cf. encore p. 19 : «Pendant une bonne partie du xiiie siècle le découpage en rues ne semble pas vraiment opérationnel, que ce soit à Paris ou ailleurs» ; «pendant tout le xiiie siècle la dénomination reste rare. À Paris en 1292, les adresses des habitants sont définies par rapport à la paroisse ou à un établissement voisin». Voir aussi Teyssot (2004, p. 322) : «Les noms propres des rues sont rarement signalés dans les textes du XIIIe siècle. Ils se multiplient seulement dans les siècles qui suivent».
[4] Une croix postposée signale dorénavant les noms disparus.
[5] Les noms remontant au gaulois seront prochainement étudiés par Pierre-Yves Lambert dans le cadre du projet d’Atlas topographique d’Augustonemetum.